Hello,
Bon, je crois qu’il est temps que je fasse ce récit !
Attention, ça va être un sacré pavé, je préviens d’avance. Les petits de Kielyr ont eu 6 semaines hier, je me rassure de jour en jour de voir qu’aucun n’a l’air de déclarer la maladie de Vampire, qui a malheureusement rejoint le nuage de gruyère le 18 Avril dans la soirée.
Ça a été terrible pour moi, sur plein d’aspects. Perdre un raton si jeune, déjà, c’est toujours une épreuve. Il était bien trop petit pour mourir, mais déjà bien assez grand pour que je me sois très attachée à lui. Ils ne sont pas censés s’envoler à 4 semaines.
Ensuite, il y a eu la maladie en elle-même. Je n’avais aucun espoir, mais on a quand même essayé de le sauver, de tenter un traitement, qui n’a pas marché. Entre le moment ou sa maladie a commencé à se voir et son décès, il s’est écoulé 3 jours, à peine le temps de réaliser ce qui me tombait dessus, de tenter de ne pas m’écrouler, pour lui, d’en parler rapidement autour de moi à d’autres rateries pour mettre les gens au courant, chercher des solutions, puis des explications.

A partir du mardi 13, jour des photos, j’ai commencé à avoir quelques doutes, je trouvais que Vampire grandissait peu par rapport à ses adelphes. Mais un retard de croissance, ça arrive, j’ai donc vérifié qu’il mangeait bien, et je me suis dit que si ça continuait, j’allais lui donner des à-côtés plus riches, ce n’était pas plus inquiétant que ça.
Jeudi après-midi, ça me travaillait, je le trouvais de plus en plus gonflé, au début c’était passé un peu inaperçu parce qu’il gardait une morphologie de raton avec un bidon tout rond, alors que les autres grandissaient et s’allongeaient.
Jeudi soir, je trouvais que ça virait pas ouf, donc j’ai envoyé des photos à certain·e·s RA en leur demandant leur avis, et iels trouvaient aussi que ça paraissait un peu bizarre.
Pour les éleveuses renseignées, l’une des grosses hantises reste le mégacôlon (MC). Cette maladie génétique bien pourrie, qu’on a (heureusement) très peu en France, mais assez commune dans certains pays étrangers. Si on fait très attention à certains marquages et provenances, ce n’est pas pour être reloues avec les gens, mais bien à cause de ça.
Le problème étant qu’il existe pas mal de théories sur la transmission de cette maladie, mais qu’à ce jour on ne sait toujours pas vraiment comment ça fonctionne (et probablement parce que c’est très compliqué).
Je vais vulgariser pour les personnes ne sachant pas du tout de quoi je parle et faire une explication très grossière, mais par exemple, on sait qu’il existe une corrélation avec un type qu’on appelle « high white » (HW), ou le rat présente des tâches blanches « désordonnées » en gros, ou alors « trop » de blanc », par exemple mettons un rat uni qui donne un petit patché, ce qui n’est pas normal.
Pour les personnes qui s’y connaissent en chiens ou en chevaux, ça se rapproche du gène de la panachure envahissante, ou du syndrome du poulain blanc. Attention, je ne dis pas que tous les rats avec des marquages « loupés » ou « très blancs » sont high white, c’est bien la difficulté du truc, sinon ça serait « trop simple ».
Le HW peut aussi ne pas poser de soucis pendant x temps. Il existe des marquages récessifs blancs qui ne sont pas dangereux également.
Quand nous avons commencé à travailler le down-under (DU) avec Cocow, nous nous sommes beaucoup penchées sur le sujet, en lisant beaucoup d’articles et d’études sur le sujet, notamment via les USA qui travaillent beaucoup avec des rats HW, ou chez le cheval, les chiens, les humains, qui peuvent être atteints également.
Parce qu’il existe plusieurs théories qui disent que le down-under est potentiellement lié à un des gènes responsables du mégacôlon, et une autre qui dit que le mégacôlon étant lié à un défaut de migration des cellules, et le DU également (pour que la couleur puisse aller « jusqu’au ventre ») et que donc parfois ça serait « mécanique » disons, et que certains rats DU déclarent la maladie à cause de ça.
On est parties un peu stressées mais en engrangeant autant d’infos qu’on pouvait, en observant +++ les ratons issus de nos portées pour voir si un truc clochait, en restant en contact avec des éleveuses travaillant aussi ce gène pour s’informer entre nous. On a fait plusieurs croisements avec plusieurs familles connues, essayé de monter la consanguinité sur une branche, fait très attention au reste de la famille DU chez d’autres éleveuses, et peu à peu on a commencé à souffler puisque rien de grave n’arrivait. Je pensais sincèrement que du coup tout irait bien (évidemment, sinon je n’aurais pas continué…)
Mais évidemment, cette information est toujours restée dans un coin de notre tête, ça fait partie du « boulot » de raterie de connaître les risques liés aux types et les diverses maladies possibles. C’est pour ça que j’étais un peu inquiète de reproduire Derek, qui présente des marques blanches totalement loupées, et j’en avais parlé à un ami et adoptant justement quelques jours avant… A la base j’avais gardé Derek par craquage (c’était mon chouchou sur sa portée) et il ne devait pas reproduire principalement pour cette raison, mais sa sœur ayant eu des soucis pour avoir une portée, et son frère étant décédé jeune, je n’avais plus trop de choix à part lui pour continuer.
A y réfléchir, peut-être est-ce un mal pour un bien, si ça avait été son frère, ça ne serait peut-être pas ressorti « maintenant », et ça aurait pu être catastrophique, qui sait ?

Mais bref, en ayant ces infos, un raton DU qui a un retard de croissance apparu vers 3 semaines et qui commence à gonfler du ventre, ça m’a fait tilter directement. J’ai été le faire échographier, et on a commencé à tenter un traitement pour qu’il évacue ce qu’il avait dans le ventre, et essayer de lui faire prendre des forces pour qu’il supporte une anesthésie pour une radio. Rien n’a fonctionné.
En parallèle, j’ai essayé pas mal de choses pour le soigner ET le nourrir, il n’avait l’air ni souffrant, ni abattu, donc j’espérais quand même un peu que ça marcherait.
Le dimanche après-midi, je suis partie travailler sur ma maison après lui avoir fait ses soins, et il jouait dans sa cage avec ma main, prenait son traitement sans souci, donc je n’ai pas pensé une seule seconde qu’il ne passerait pas la journée, j’étais carrément confiante. En rentrant moins de 4h plus tard, je l’ai trouvé bizarre, il venait me voir, me sentir les doigts, réclamer des câlins, mais sa démarche était hésitante, pas comme d’habitude.
J’ai commencé à m’inquiéter un peu, je l’ai sorti pour ses soins, mis avec sa maman, mais il a refusé de téter, ce qui n’était évidemment pas normal. Je le trouvais un peu froid, j’ai donc essayé de le réchauffer, et pendant que je préparais le tapis chauffant, il a commencé à avoir quelques mouvements qui m’ont paru être un début de troubles neurologiques.
A partir de ce moment là c’est allé très vite : moins de 15mn plus tard, il était parti, dans mes mains, et VRAIMENT je ne souhaite ça à personne.
Depuis, je suis terrorisée. Parce que, même si tout le monde me dit que c’est faux, une partie de moi se dit que c’est de ma faute, que c’est moi qui ait fait naître ce raton, et même si évidemment je ne l’aurais pas fait si j’avais si qu’il risquait d’être malade, je suis quand même « responsable » de ces vies.
Parce que j’ai peur, TOUS LES JOURS depuis, dès que je me lève le matin, de voir un autre de mes ratons tout gonflé. Parce que j’ai l’impression qu’il est mort hier et à la fois il y a un mois, je n’ai clairement plus aucune notion du temps, et je n’arrive plus du tout à fonctionner correctement.
Parce que je me tape des crises d’angoisse de l’espace et des cauchemars absolument ignobles où tous mes rats meurent.
J’ai très sincèrement pensé à arrêter la raterie, parce que je supporterais pas de vivre encore ça. Gérer tout ça, gérer le fait que son adoptante se retrouve sans raton et devoir lui annoncer, prévenir tout le monde ayant des rats liés à cette famille.
Gérer l’idée que potentiellement des années de mon travail soient remises en cause, potentiellement devoir tout stopper, gérer l’idée que ça impacte potentiellement d’autres rateries, d’autres familles, et encore, toujours, cette culpabilité.
Je n’aurais jamais pu me relever sans cette communauté formidable, les personnes qui se sont relayées pour m’envoyer leur soutien, pour qu’on parle de ça, pour qu’on parle de tout sauf ça, pour faire des recherches, pour comprendre d’où ça pourrait venir, pour m’aider à prendre des décisions sur la marche à suivre, vous vous reconnaîtrez toustes, mais je pense que vous n’imaginez pas comme vous m’avez été vitales ces 2 dernières semaines…
Y’aura jamais assez de merci pour ça, et y’a une place spéciale dans tous les paradis de l’univers pour vous.

A ce jour, on ne sait toujours pas, et il est impossible de le savoir avec nos maigres moyens, si c’était génétique, si c’était juste un « coup de malchance » sur lui, qui ça peut impacter d’autre dans sa famille. L’autopsie effectuée ne m’a donné aucune réponse, et d’ailleurs je vous ferais grâce du récit.
Au delà des précautions minimales, c’est à dire ne reproduire aucun raton de cette portée, ni les fratries des parents, il est très délicat de savoir quoi faire. Je suis d’ailleurs très reconnaissante aux personnes merveilleuses que j’ai citées pour leur aide, parce que très clairement, mon cerveau, c’est de la compote actuellement.
Certain·e·s n’ont pas compris pourquoi c’était « si grave » et si impactant pour moi tout ça, au delà du décès de mon petit bout, j’espère que cette explication vous fera saisir l’étendue de la situation.
Certain·e·s ont également cru que j’allais mieux, notamment via ma présence sur le forum pour parler d’autre chose, mais parler d’autre chose est juste parfois un moyen pour moi de ne pas focaliser en continu sur cette situation affreuse. Et c’est pour ça que je n’ai posté ni photos, ni nouvelles des ratons publiquement depuis, ce qui a pu être pas bien compris en me voyant poster ailleurs. C’est juste ma personnalité de compartimenter et de masquer, ce n’est pas que « tout va bien ».
Même si certes, je ne suis pas aussi mal que j’ai pu l’être sur le coup, je vous assure que je suis loin d’être remise, et que ça prendra du temps, beaucoup de temps. En fait, je peux dire avec certitude qu’après ça, rien ne sera plus jamais comme avant.
Des décisions vont être prises, c’est un peu mon dernier « essai » avant de raccrocher, quelque part. Parce que je ne veux pas arrêter, mais là, je tiendrais plus comme ça. J’aurais déjà du lancer ma prochaine portée, mais rien que l’idée d’avoir des ratons maintenant me fait flipper à un point que peu peuvent imaginer.
Comme toutes les rateries, je ne suis pas un magasin, ce n’est pas mon métier d’élever des rats, je ne suis pas un grossiste, je suis juste Jemma, qui voue une passion profonde aux rats et a décidé d’en faire le centre de son monde il y a 13 ans en ouvrant la raterie. Et ça, ce qui s’est passé, c’est un bout de mon cœur qui s’est déchiré. Après 2 ans à avoir l’impression que tout partait peu à peu en fumée, la raterie a touché le fond, et très franchement si ça doit creuser, j’arrêterais. Voilà l’explication des événements, si il y a des questions, j’y répondrais, peut-être pas tout de suite, peut-être pas super efficacement, mais j’essaierais en tout cas
En mémoire de Vampire Stargazing, parti avant d’avoir pu vivre, en emportant un morceau de mon cœur plus grand que lui
